Un club / Une action : Martigues Rugby Club, Jeunesse et inclusion au coeur du projet

15/03/2023
Le label Club Engagé fait une halte à Martigues en Provence. Dans une ville à fort accent football, le rugby a une place et un rôle sociétal à jouer, porté par des personnalités attachantes et pleines d’entrain.

La ville de Martigues est surnommée la Venise provençale pour son centre-ville riche de canaux, de ponts et de couleurs. La vie y est douce pour la plupart de ses 50 000 habitants, entre Méditerranée et étang de Berre, même si quelques quartiers populaires sont un peu plus en difficulté. C’est aussi en pensant à eux que le Martigues Rugby Club (MRC) étend ses ailes en même temps que son action. Jeune club de rugby créé en 2019, cette entité des Bouches-du-Rhône et du bassin Côte Bleue grandit à l’image de ses jeunes : vite ! Le club Martigues – Port-de-Bouc a en effet vu son entente de 1987 dissoute. Ainsi, les Phénix du Martigues Rugby Club prennent leur envol.

Le MRC est parti des fondations : disposer d’une école de rugby forte, généreuse et attractive, des Baby Rugby jusqu’aux juniors (en rassemblement). Avec le viaduc de l’A55 ou le chenal de Caronte comme décor, l’entité rouge et jaune dispose d’un terrain synthétique au lieu-dit de la Coudoulière. Attenants, les vestiaires et le club-house ne cessent de grandir et de s’équiper afin de toujours divertir et fidéliser des enfants davantage attirés par le football et le phare OM non loin. Labellisé Club Engagé, le club a fait de l’inclusion une valeur centrale. Ainsi, les Martégaux ne disposent pas d’équipes séniors afin de donner plus de temps et de moyens à la jeunesse.

Il y a les opérations type Octobre rose, lotos, vide-greniers ou invitations à des matches des Bleus ou d’équipes pro, mais aussi des aides financières pour les licences ou les dotations. Tout est fait pour alléger les contraintes budgétaires des familles, comme l’explique le président Simoné Cirillo : « Qu’il s’agisse de sport, de valeurs, de goûters offerts après chaque entraînement, de tenues, de convivialité ou des événements qu’on propose, on le fait toujours avec passion. »

À Martigues, il y a aussi et surtout le Street Rugby, une action inclusive avec les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) dans lesquels le club se rend les soirs afin de faire découvrir le ballon ovale, voire le sport. Un terrain de street, une dalle ou du béton font l’affaire tant que cela permet d’attirer les enfants. Neuf cessions ont été effectuées l’été dernier et six autres à Noël. En sortie de Covid, la famille Barhoumi a ciblé un sport collectif de plein air. Voilà comment Ahlem, originaire d’un QPV, ex-handballeuse, éducatrice et maman du petit Ismail, est devenue agent administratif du MRC, en charge notamment du Street Rugby. « J’essaie d’aller voir des filles ou des petites filles que j’appelle des princesses guerrières afin de générer de la curiosité. Et cela prend vite quand vous savez y faire. »

Professeur d’EPS et responsable de l’école de rugby, Sylvain Conties, ancien cadre technique à la FFR, a pas mal bourlingué. Il donne les recettes de la réussite : « Hors de question d’y aller en frontal avec ces gamins. Tout doucement, il faut créer un lien ou de la curiosité, notamment avec des ateliers ludiques, des ballons, des sacs de plaquage ou de la discussion. Soit on a des minots qui jouent au foot et à qui on va essayer de montrer autre chose, soit ce sont des enfants exclus du foot ou pas intéressés qu’on va capter. »

L’intérêt est double : occuper une partie de la jeunesse martégale et en convaincre certains de rejoindre durablement le club, qui propose aussi un bus de ramassage avant et après les entraînements. Ainsi, trois semaines après avoir découvert le rugby via cette opération, le petit Krimo a rejoint le club. « À la fin d’un match, il a pleuré toutes les larmes de son corps quand un adversaire a refusé de lui serrer la main », se souvient Ahlem. Anecdotique au foot qu’il pratiquait auparavant mais « il avait déjà intégré l’une des règles essentielles du rugby : le respect de l’adversaire ».

Motivation, Respect, Communauté

Le Beach Rugby, en partenariat avec des centres sociaux et maisons de quartier, et le Rugby Loisir complètent l’offre. Souvent sur les plages voisines. Des stages (Beach Phenix ou Camps Phenix) sont mis en place durant les vacances scolaires, ciblant aussi les enfants des quartiers, qui viennent cette fois au club. En plus de s’amuser, les gosses sont initiés à quelques valeurs d’ovalie, d’humanité (le club est devenu ami de l’UNICEF) ou d’écologie. « Ces valeurs sociétales enrichissent celles du rugby et vice versa ! » argue Ahlem. Une expérimentation nommée mesure de responsabilisation (en partenariat avec l’académie, le rectorat et les établissements) permet enfin d’accueillir des collégiens et lycéens exclus temporairement de leur établissement. Au club, ils découvrent l’univers d’une association rugby et réalisent des tâches d’intérêt général.

Alors que l’école de rugby est fièrement labellisée deux étoiles, ce sont près de 25 bénévoles et éducateurs qui œuvrent quotidiennement, quand quatre éducatrices sont en cours de formation : Ambre, Ahlem, Flore et Sarah. La trésorière Aline Boucoux, la secrétaire générale Pauline Bourdon (homonyme de l’ancienne internationale française), Valentin Grange, salarié davantage en charge du sportif et du scolaire, ou Togui Belba, bénévole issu des quartiers qui a commencé via… le Street Rugby, sont d’autres bénévoles actifs et impliqués.

« Nos actions et l’aide de la mairie font que tout va pour les minots et l’école de rugby, insiste Sylvain Conties. On a ensuite eu la chance de pouvoir travailler avec une très grande majorité d’éducateurs que l’on connaissait. On aspire à être une deuxième famille pour bien des gens en proposant une formation de qualité en un lieu où il fait bon vivre. » En plus des aides municipales pour le sport et de la recherche de partenaires, Ahlem Barhoumi se démène afin de solliciter des subventions auprès des collectivités, avec des dossiers étoffés. Timide et impulsive, la principale concernée en rougit. « Il y a de quoi perdre ses nerfs parfois dans le montage des dossiers et appels d’offres, mais on se remotive en pensant aux enfants. »

En se tournant vers l’avenir, un secrétariat va agrandir les locaux quand un demi-terrain d’entraînement et un de Beach Rugby devraient étendre l’offre. Sylvain Conties n’oublie pas les résultats : « On n’est peut-être pas les meilleurs mais nous sommes un club au grand cœur. Notre prochain challenge sera de conserver nos valeurs tout en étant plus performants quant aux résultats pour conserver plus longtemps nos meilleurs éléments. » Et cela ne ferait que renforcer la devise du club, fondée sur son abréviation : Motivation, Respect, Communauté.

MARTIGUES RUGBY CLUB