Rugby Amateur  : Tous champions (Partie 2)

12/08/2025
Jouer une finale de championnat de France, c’est entrer dans une arène sacrée où l’honneur, le courage et la fraternité règnent en maîtres. Ce sont des épreuves et des destins pour ces joueurs amateurs fièrement portés par tout un club, tout un village, toute une vie.

Nous avons suivi six finales  : celle de Nationale à Narbonne, l’Élite 2 féminine à Auch, la Fédérale 1 à Cognac, l’Excellence B à Nogaro, la Régionale 1 M19 à Larche et la Régionale 3 à Port-de-Bouc. Six finales, six lieux, six histoires où les joueuses et joueurs s’entremêlent avec les pratiquants, les bénévoles, les supporters, l’école de rugby, les dirigeants dans ce temple qu’est le terrain, tous veulent toucher le domaine des dieux.

Rugby amateur  : Tous champions (Partie 1)

Jouer une finale de championnat de France, c’est entrer dans une arène sacrée où l’honneur, le courage et la fraternité règnent en maîtres. Ce…

… Autre salle, mais même ambiance  : à Port-de-Bouc, dans l’extrême sud-est de l’Hexagone, la sécurité fait un peu patienter en file indienne la foule bigarrée devant le stade François-Baudillon. La finale du jour, celle de Régionale 3, oppose Lieuran XV (34) au Rugby Club Hyères-Carqueiranne-La Crau (83). Bien que supportant des équipes rivales, Julien, Nicolas et Benoît en profitent pour sympathiser. « On s’est rencontrés et on est allés boire un verre ensemble, s’amusent-ils de concert. Ça s’est fait naturellement, on est tous là pour vivre une grande journée, donc on la partage. »

Toujours dans ces mêmes tribunes, Manon Pagès, la compagne d’un joueur et maman de deux têtes blondes qui s’amusent davantage avec leurs jouets qu’elles ne suivent l’échauffement des équipes  : « On peut bien sûr venir voir un match en famille, rappelle la maman. Même si elles sont petites, c’est une chance pour les enfants de voir leur papa et l’équipe donner le meilleur sur le terrain. » Pas besoin de décret de famille pour être présent ce jour-là !

Les supporters réservent un accueil formidable

Direction la Corrèze à présent, ses pâturages et son village de Larche tout proche de Brive-la-Gaillarde où le cours d’eau, la Couze, entoure le stade Alexis-Jaubert et file derrière sa modeste tribune. Une épuisette télescopique y est même posée non loin pour repêcher quelques ballons égarés. Pour la finale de Régionale 1 M19, le XV de La Dombes (01) affronte le Rassemblement Bassin Adour Saint-Paul-lès-Dax (40). Le club local, le Rugby Causse Vézère Riverains (Fédérale 2), accueille sa toute première finale. Un événement, notamment pour Jospeh Matos, le trésorier du club de Larche. « On accueille surtout cet événement pour l’ambiance et ce que cela procure comme plaisir. Les recettes sont secondaires », pose-t-il. Un rapide coup d’œil à la météo du jour oblige le dirigeant à admettre tout sourire  : « Avec ces chaleurs, les gens boivent davantage, c’est bien. »

Déguisé dans l’esprit Seven, notamment avec sa perruque et ses homards en guise de mules, Thomas Bordet, supporter du XV de la Dombes mais aussi joueur, éducateur et arbitre du club, n’oublie pas l’essentiel  : « Que les gamins prennent du plaisir  ! Ils nous ont fait voyager dans toute la France ou presque cette saison. On est venus avec deux bus de supporters. Dès 11 heures, on a mis l’ambiance dans le village. Avec ces chaleurs, les joueurs vont devoir beaucoup s’hydrater durant le match. » Avant de reprendredans un grand éclat de rire  :« Et nous aussi ! »

Comme sur tous les autres lieux de ces finales, les aficionados réservent un accueil formidable à leurs fiers représentants crampons aux pieds. En Limousin, une haie d’honneur est même dressée, les joueurs passant un par un sous le panneau de leur ville afin de rejoindre les vestiaires. Son échauffement terminé, Pierre Toussaint, l’arbitre central, revient aussi au vestiaire des référés pour un dernier brief avec ses deux assesseurs. Lui qui dispute sa 35e et dernière saison d’arbitrage espérait finir sur une finale. « Une finale, c’est aussi le graal pour les arbitres, révèle-t-il. C’est l’aboutissement d’une carrière et c’est aussi beau que ça l’est pour les joueurs. » La saison prochaine, il sera responsable des arbitres du Rhône pour continuer de transmettre.

Dans le jeu des 7 familles, on trouve aussi le blessé

Retour dans le Gers, mais à Nogaro où se joue la finale d’Excellence B entre Tournefeuille (31) et Côte Landes (40). Au lendemain de violents orages qui ont succédé aux fortes chaleurs, les branches et feuilles jonchent encore les routes et abords du stade municipal dont l’originalité est de se trouver entre l’aérodrome et le célèbre circuit de course. Les images et les bruits des avions, des hélicoptères et des grosses cylindrées vont accompagner ce rassemblement rugbystique. Dans le jeu des 7 familles de ces jours de finales, on trouve aussi le blessé, malheureux de ne pouvoir disputer l’ultime match avec ses copains. La cheville dans une attelle, le trois-quarts de Tournefeuille Rugby Rudy Bachere colle ici malgré tout au plus près des copains lors de l’échauffement. Et affiche son soutien sans faille  : « Je ne les lâche pas. Cette finale est méritée après notre parcours en phase régulière avant de monter le curseur des performances à chaque match à élimination. Même si je ne joue pas, on gagnera tous ensemble. » Nul doute que l’ailier est aussi prêt que ses copains !

De retour à Cognac, où l’expérimenté club de l’US Tyrosse se prépare à affronter l’Union Saint-Denis-Drancy 93, une coopération entre les deux clubs au niveau séniors qui vient de réaliser une grande saison puisqu’elle a déjà validé son billet pour la Nationale 2. Farid Amari, coprésident du l’UDSD 93  : « On a créé un engouement qui nous dépasse un peu, relève-t-il. On reçoit des messages de soutien de toute la France et même des territoires ultramarins. Même si on a deux fois plus de distance, nos supporters sont venus à deux bus. Il y en a qui passent le bac demain », commente-t-il en remerciant chaleureusement les fans.

Son binôme, Olivier Gleveo, président de Saint-Denis depuis vingt ans, vit, lui, sa première finale au stade  : « En 2006, pour la seule finale (perdue, ndlr) du club en Honneur contre Lectoure, j’étais hospitalisé pour un problème au cœur. Cette année, je peux savourer. On a déjà acté une montée exceptionnelle, avec un déficit de 18 points à la mi-temps du quart de finale retour contre le Stade bagnérais. On inscrit un 27-0 lors de la seconde… » Ironie des désignations de terrain, les Ciel et Jaune de l’UDSD s’apprêtent à clore cette saison historique exactement là où ils l’ont commencée, et c’était une victoire.

À cette époque, peu de supporters franciliens avaient fait le déplacement. C’est le cas de Bintou, qui est bien là ce dimanche de juin, et ce dès les aurores, avec toutes ses copines  : « J’ai fait nuit blanche, impossible de dormir. On ne va pas voir les matches à l’extérieur normalement, mais là, c’est exceptionnel, c’est la finale ! » Maillot de l’équipe sur le dos, mais béquilles en main, Nabil Hamdouni est évidemment venu supporter les copains  : « Niveau public, ça va être dur de rivaliser, les Tyrossais sont venus nombreux. Mais on va faire entendre notre voix, celle du 9-3. C’est une fierté d’être là au terme d’une saison maîtrisée, avec l’objectif de la montée atteint. Moi, je joue au rugby depuis 2018. J’allais arrêter, mais j’ai continué pour rendre hommage à mon ami de promo de fac, Nicolas Chauvin, parti trop tôt. Le rugby est un sport incroyable », clame le deuxième ou troisième ligne devant l’entrée du stade.

À SUIVRE …