Jean-Marc Béderède : « Une étape du parcours »
18/04/2025Quel est votre bilan de ce dernier rassemblement Élite Jeunes Génération Bleue à Fréjus ?
Très positif. Le premier enjeu concernait l’organisation. On a vu qu’on est de plus en plus performants chaque saison avec l’expérience accumulée. Ça nous offre les conditions que l’on recherche : un confort de travail, de la fluidité dans les déplacements de près de 500 participants dont 300 joueuses et joueurs, des moyens d’hébergement, médicaux, de récupération ou de restauration plus que confortables. Tout ça a été très apprécié, par les joueurs et par les staffs. Chacun a ainsi eu les moyens de donner le meilleur de soi en termes de performance durant dix jours et de s’éclater.
Quel est l’enjeu au niveau sportif ?
C’est avant tout un gros travail d’évaluation pour les staffs et les superviseurs. C’est une réelle richesse de faire se rencontrer de jeunes gens de tous horizons et d’univers différents. On voulait que ces jeunes se challengent au maximum et ce fut le cas. Ça ne veut pas dire automatiquement qu’ils seront le futur des XV de France, mais ce regroupement des meilleurs potentiels les fait se challenger et progresser, avant de pouvoir les hiérarchiser en vue des équipes de France M18.
Comment s’organise le débrief d’un tel rassemblement ?
C’est une période très chargée avec des échéances qui arrivent vite, dès le 29 mars pour les M18 garçons avec la Géorgie avant le Festival des 6 Nations. On est sortis de dix jours très intenses avec des intervenants enchaînant sur d’autres missions. On est structurés avec des chefs de projet (Éric Lachaize pour les garçons, Frédéric Pomarel pour les filles) qui ont consulté tous les managers d’équipe. Puis, avec l’équipe de superviseurs, ça débouche sur un comité de sélection qui a réuni le 14 mars le staff M18, le manager général Jeunes Cédric Laborde et moi-même à titre consultatif. Notre mission était de faire le choix du groupe pour la Géorgie avec une projection sur le Festival des 6 Nations.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors de cette nouvelle édition d’Élite Jeunes ?
Avec le recul qu’on possède désormais, on acquiert plus de sérénité dans l’articulation de l’événement. On a notamment mis en place une nouveauté cette année, une journée off qui a été très appréciée. Dans cet environnement de sélection, ça ne s’arrête pas pendant dix jours. C’est rugby matin, midi et même le soir avec des échanges entre collègues. C’est important de couper un peu, que chacun s’organise comme il veut, qu’il continue d’échanger s’il veut mais dans un autre cadre. Ça s’est organisé sous la responsabilité de l’encadrement, il ne faut pas oublier que ce sont des mineurs… Et ça renforce encore le lien entre le staff et les joueurs, ça permet d’encore mieux se connaître, de partager. Autre point positif, on a vu beaucoup de nouvelles têtes dans les encadrements, des jeunes éducateurs qui arrivent, qui s’investissent toute l’année sur les Mercredis Bleus ou des stages Projet Bleu. Ça apporte un nouveau point de vue et de nouvelles compétences. C’est une grande richesse.
Les filles M18 étaient réunies pour la deuxième fois. Êtes-vous satisfait de leur rassemblement ?
Oui et il faut féliciter tous les staffs, toutes fonctions confondues. Elles étaient logées dans un hôtel un peu excentré, mais dans de très bonnes conditions. Ça a très bien fonctionné, l’investissement des filles sur et en dehors du terrain a été remarquable. Il fallait voir la réaction de Romain Huet (entraîneur de France 7 Féminin) sur le match organisé en fin de stage. L’évolution du niveau de jeu des filles ces dernières années est extraordinaire, la qualité de ce match en témoigne. Les filles ont montré toutes leurs qualités collectives et individuelles, leur capacité à vite déplacer le ballon, à alterner les formes de jeu, à être fortes au contact, précises. C’était vraiment très riche de ce point de vue.
Elles s’élancent maintenant vers le Festival des 6 Nations, une suite logique qu’elles dominent dernièrement ?
Filles ou garçons, on raisonne en parcours. Quel parcours va-t-on leur bâtir pour qu’ils rencontrent des moments extraordinaires comme un match international et une sélection ? Il faut en profiter et respecter tout ce que ça représente en termes d’engagement. Ce Festival se situe sur ce parcours de développement. La maturité est beaucoup plus précoce chez les filles en termes de niveau de performance, ça souligne encore plus l’intérêt de cette compétition. C’est la première étape d’acculturation à l’équipe de France, au fonctionnement en sélection, à jouer des matches d’une intensité qu’elles ne rencontrent pas souvent.
Peut-on envisager à court terme une catégorie M17 ou M16 pour les féminines comme pour les garçons ?
Augmenter le nombre de participantes est un objectif, mais ça voudra dire que le rugby féminin chez les jeunes aura lui aussi augmenté, progressé. Les dernières années montrent qu’on va vers cette tendance. Le nombre choisi aujourd’hui correspond bien à la densité dont on dispose. On regarde chaque année dans quelles mesures on peut intégrer de nouvelles filles tout en gardant un niveau d’exigence élevé. Avec le travail des clubs, ce nombre est forcément amené à augmenter.
Quid des M18 garçons ? Est-ce une promotion prometteuse ?
Il y a de la qualité, c’est clair, et à chaque poste. C’est très riche et ça met en valeur tout le travail réalisé dans la filière de détection puisque ces M18 sont souvent issus d’un cursus entamé il y a déjà quatre ans. Ça souligne évidemment tout le travail fait dans les clubs qui permet de développer ces jeunes. Chaque année, on se fait la réflexion sur leurs qualités physiques, sur des morphotypes de plus en plus grands, costauds, puissants, rapides. Cette année, on s’est même fait la réflexion sur les M16 très impressionnants ! Chez les M18, le match organisé a été très engagé. Sans parler d’affrontement, de se rentrer dedans, on voit que les niveaux d’engagement et d’opposition augmentent.
Cela permet également de voir les joueurs dans un contexte de haut niveau ?
Oui, le plus haut possible de leur catégorie avec ce Festival. Et de se projeter sur plusieurs années parce que ça va très vite. On voit Louis Bielle-Biarrey et d’autres, il y aura bientôt plus rapide ! Le niveau global de ce match était très intéressant, et il y avait des absents. Ça rend la tâche difficile au sélectionneur. Mais on martèle ce message : ce n’est qu’une étape du parcours. Un joueur qui n’est pas sélectionné pour la Géorgie et le Festival doit garder sa motivation et son engagement. Vu le niveau de ce match, on ne les perdra pas de vue et on pourrait très bien les revoir en M20.
Évoquons les Académies-pôles Espoirs où évoluent les M18 durant la saison. Les interactions et échanges sont-ils fructueux ?
Le rassemblement de Fréjus est bien la démonstration du projet : travailler sur l’environnement du joueur, sur la relation, le lien avec les encadrements de l’APE et du club où ils passent toute l’année. C’est un travail à réaliser par le manager d’Académie, en lien avec les responsables sportifs des clubs. Cette collaboration s’est nettement améliorée. L’enjeu n’est plus d’arriver à collaborer, mais d’être de plus en plus performants dans cette collaboration. C’est une bonne chose pour les joueurs, ça se voit au travers de leurs performances sur le terrain.
L’application Génération Bleue a également franchi un cap. Que représente-t-elle parmi tous les outils dont bénéficie la filière ?
C’est une évolution majeure, c’est sûr. Ce qui est important, c’est le sens des choses. La qualité des outils va aussi impacter ce qu’on peut faire par la suite. Cet outil-là correspond parfaitement à ce qu’on veut : échanger entre staffs, simplifier le suivi des joueurs. C’est du temps gagné pour faire autre chose. C’est un outil qui permet de partager entre entraîneurs fédéraux et de clubs ; il permet aussi aux joueurs de s’auto-évaluer, de partager leur évaluation et de consulter l’évaluation des entraîneurs. C’est important dans la relation entraîneur-entraîné. Enfin, c’est un outil extraordinaire car il est évolutif. Il n’a pas été conçu pour ça, mais il nous aide pour nos évaluations de match.
Vous interrogez-vous sur la qualité de la détection, du suivi ?
Forcément. Et Génération Bleue permet de faire des bilans, de se questionner sur les parcours des joueurs. Quelles qualités avaient à leur âge Antoine Dupont, Damian Penaud ou Marko Gazzotti ? Qu’étaient-ils en M15, leur morphotype, à quels événements ont-ils participé ? On aura tout ce suivi longitudinal, l’historique de chaque joueur qui intégrera le XV de France. D’ici cinq ou six ans, on pourra retracer tout leur parcours et ça va nous aider à être plus performants, à cibler nos objectifs. Ce sont de belles perspectives d’évolution dans notre façon de faire.
Après les deux Festivals des 6 Nations, quelle sera la prochaine étape pour ces générations et pour vous ?
Ce festival est le point d’orgue de ces catégories. Beaucoup ont aussi des perspectives à 7 avec les championnats d’Europe à Bourgoin-Jallieu (12 et 13 juillet). Puis il faudra assurer la transition et l’accompagnement jusqu’au prochain rassemblement M20 Développement à l’automne. Entre ces temps-là, on évalue le plan partagé individuel de développement (PPID), repositionné pour chaque joueuse et joueur, et on repart sur une période de développement pour la saison internationale M20.